Quand l'Ego frappe à notre porte.
Un chemin vallonné
Que ce soit avec Tamura senseï, Hino senseÏ, Kono senseï, Kuroda senseï parfois lors d'un stage un sentiment de frustration peut s'emparer de nous tant le fossé peut sembler infranchissable.
Parfois le ressenti est positif, les techniques arrivent plus ou moins à venir sans "difficulté" et d'autres fois, au contraire, rien ou presque ne passe.
La voie que l'on emprunte dans les budos ressemble en ce sens à un chemin vallonné oscillant entre des phases ascendantes et descendantes. En général lorsque l'on commence à se sentir trop à l'aise c'est qu'on arrive en haut de la côte et la descente s'amorce avec les remises en questions qui affluent.
Hakone par Hiroshige extrait des 53 stations du Tokaïdo
A la différence des sports de compétition où l'entrainement vise à la performance et où l'Ego est facilement nourri, dans les budo, dans les bujutsu, l'essentiel du travail, dans l'idéal, consiste au contraire à tenter d'effacer l'Ego pour laisser la technique jaillir, sans pensée, Mushin no shin. Voici ce qu'en dit le maître zen, Takuan Soho:
"L'esprit devrait toujours être dans un état de fluidité, lorsqu'il s'arrête sur quelque chose le flux est interrompu et c'est l'interruption qui est préjudiciable au bien-être de l'esprit. Dans le cas d'un sabreur, cela signifie la mort. Quand le sabreur se tient devant son adversaire, il ne pense pas à son ennemi, ni à lui-même, ni aux mouvements du sabre de son adversaire. Il se tient juste là avec son sabre, qui oubliant toute technique, est prêt à suivre uniquement ce que lui dicte le subconscient. L'homme s'est effacé en maniant le sabre. Quand il frappe, ce n'est pas l'homme mais le sabre dans les mains du subconscient de la personne, qui frappe."
Je ne crois pas me tromper en avançant que nous retombons facilement dans un model compétitif à "l'insu de notre plein gré"...et lentement mais sûrement l'ego reprends le dessus. Comment tourner ce va et vient incessant à notre avantage?
De l'expérience né le progrès
Transformer notre expérience négative, frustration née de la volonté de réussir, de faire, en énergie positive pour progresser dans la volonté de ne pas faire, d’agir sans vouloir agir…
Contrôler l’Ego? Le laisser s’exprimer? L’utiliser? Qu’en est il au final?
On parle de lui comme de l’ennemi juré dans les arts martiaux, dans la méditation, au fond si comme si nous devions lutter en permanence contre nous même. Doit-on absolument chercher à faire taire cet Ego? Est ce là le sens de notre pratique? Plutôt que de combattre contre soi même, et par extension contre les autres, ne serait-il pas plus utile de trouver un terrain d’entente? Un Equilibre?
Yin et Yang en Chine, In et Yo au Japon symbole de l'équlibre entre le vide et plein, la volonté et son absence...
C’est un peu le sens de la recherche martiale. Trouver un moyen d’harmoniser l’esprit et le corps afin d’obtenir une utilisation optimale de nos fonctions? Enlever les tensions inutiles du corps, souvent liées à celles de l’esprit, afin d’unifier notre pensée et notre mouvement. Peut-être est-ce un peu cette idée quand on parle de « Non-pensée »? Non pas un état où plus rien ne passe car sans cela l’action n'existe pas mais un état où étant uni aux mouvements du corps l’esprit se tait, accompagne et guide silencieusement.
Bien évidemment il s'agit d'une réflexion personnelle sur un sujet complexe, intangible. C'est une piste que j'ai développée autour de ma propre expérience et je tenais à la partager. Plutôt que de m'énerver de mes échecs dans la pratique j'essaye d'apprendre d'eux. J'ai l'impression d'être plus habile avec le temps mais peut être est-ce encore un tour de l'Ego...
Tour de Lego...